Un compagnonnage, des sociétés rivales - Texte

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« Il y a deux sociétés de fondation immémoriale ; nous venons de les nommer [NDLR : les deux plus anciennes sociétés, celle de Salomon et celle de Maître Jacques, autrement dites des gavots et des dévorants, autrement dites encore le Devoir et le Devoir de liberté]. De ces deux sociétés, ou de l’une des deux, est issue une troisième société, ennemie des deux autres : celle de l’Union ou des Indépendants, dits les Révoltés. Elle fut créée en 1830 à Bordeaux, par des aspirants qui se révoltèrent contre leurs compagnons. À Lyon, à Marseille, à Nantes, de nombreux insurgés du même ordre se joignirent à eux et constituèrent l’Union. Une quatrième société est celle du Père Soubise, qui se dit aussi Dévorante. Ainsi quatre sociétés principales ou Devoirs, qui se composent chacune de plusieurs corps de métiers, et auxquelles se rattachent de nombreuses adjonctions d’institution plus ou moins récente, les unes acceptées cordialement, les autres repoussées avec acharnement par les sociétés auxquelles elles veulent s’unir de gré ou de force.

Enfin tous ces camps divers et dissidents sont réunis dans une même appellation, les Compagnons du tour de France. Chaque société a ses villes de Devoir, où les compagnons peuvent stationner, s’instruire et travailler, en participant à l’aide, aux secours et à la protection d’un corps de compagnons qu’on appelle par application générique société, et dont les membres se fixent ou se renouvellent suivant leurs intérêts ou leurs besoins. […]

Certaines villes peuvent être occupées par des Devoirs différents ; certaines autres sont la propriété exclusive d’un seul Devoir, soit par antique coutume, soit par transaction, comme il est arrivé pour le marché de cent ans de la ville de Lyon. Certaines bases sont communes à tous les Devoirs et à tous les corps qui les composent : et à voir la chose en grand, ces bases principales sont nobles et généreuses. L’embauchage, c’est-à-dire l’admission de l’ouvrier au travail ; le levage d’acquit, c’est-à-dire la garantie de son honneur ; les rapports du compagnon avec le maître ; la conduite, c’est-à-dire les adieux fraternels érigés en cérémonies ; les soins et secours accordés aux malades, les honneurs rendus aux morts, la célébration des fêtes patronales, et beaucoup d’autres coutumes, sont à peu près les mêmes dans tout le compagnonnage. Ce qui diffère, ce sont les formes extérieures, les formules, les titres, les insignes, les couleurs, les chansons, etc. »

George Sand, Le Compagnon du tour de France, Chapitre X, 1840

Source : https://lesmanuelslibres.region-academique-idf.fr
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